Quand l’enfant parait… !
Prévention de l’agression d’un chien
Docteur Christian FIALAIRE
Vétérinaire Comportementaliste Diplômé des ENV
Quand l’enfant parait… !
Pendant la grossesse, le chien est informé, parfois le premier. Il peut être irritable, excitable, parfois sexuellement énervé.
Cette irritabilité se manifeste vis-à-vis de tout le monde, y compris de la femme enceinte.
Qu’est-ce qu’un bébé pour un chien ?
– une « chose » qui appartient au couple dominant (normal) ;
– un intrus dans la vie, une perturbation des routines (anxiété) ;
– un concurrent pour la recherche d’attention des propriétaire (normal) ;
– le coupable d’une perte de privilèges, à éliminer (dominant) ;
– le chiot de la meute, à s’approprier, à kidnapper (chienne dominante) ;
– un petit animal qui se chasse (chien non socialisé aux bébés) ;
– une chose inconnue qu’il faut éviter (phobique, anxieux) ; …
Afin d’atténuer l’impression de rupture ou de détachement pour le chien, on peut réduire progressivement le niveau d’attention pendant les derniers mois de grossesse pour arriver à presque rien à l’arrivée du bébé.
De même, une fois le bébé à la maison, être indifférent au chien quand le bébé n’est pas dans la pièce et donner des attentions au chien en présence du bébé. Le chien va associer le bébé à un surcroît d’attention et non à un retrait d’attention.
Prévoir le comportement de l’enfant
– de la naissance à 6 mois: l’enfant n’a pas de capacité motrice volontaire vers l’animal ; il est peu sujet à l’agression défensive d’un chien
– de 6 mois à 12-18 mois: l’enfant marche à 4 pattes, roule en trotteur, ensuite marche debout ; il se déplace activement vers le chien è sujet à des réactions de défense de sa part.
– de 18 mois à 2 ans et demi – 3 ans: (âge du « non ») il teste ses parents et s’oppose au maximum de risque.
– De 3 à 6 ans: diminution du risque, + enfant absent (à l’école…)
Chien et enfant ensemble
– Règle absolue: on ne laisse pas un enfant de moins de 3 à 5 ans et un chien ensemble sans surveillance. On emporte l’enfant ou le chien avec soi (répondre au téléphone, ouvrir la porte d’entrée…) mais on ne laisse pas le chien et l’enfant sans surveillance.
– De même: On ne laisse pas un enfant jouer par terre à côté du chien alors que l’on regarde la télévision ou qu’on lit un livre, sans surveiller les deux compères. On a pas le temps d’intervenir.
Retour de maternité
Possibilité d’emporter les langes et les vêtements sales du bébé à la maison afin que le chien s’habitue à l’odeur de l’enfant avant que celui-ci n’arrive.
Mais ne pas donner ces objets au chien pour qu’il joue avec, les lèche, les déchire… ces objets doivent être intouchables. Le but de cet apprentissage n’est pas d’apprendre au chien qu’il peut lécher et manger l’enfant mais de l’habituer à ses odeurs et à les respecter
Les risques
– 65% des enfants sont mordus à la maison et 35% sur la voie publique
– Les garçons sont plus souvent mordus que les filles.
– À la maison, l’enfant connaissait le chien dans 93,8% des cas et le chien faisait partie de la famille dans 84,6% des cas.
– Les enfants qui dérangent le chien au moment du repas ou du sommeil sont plus jeunes (4 ans en moyenne) que ceux qui sont mordus lors des activités de jeu (8,5 ans en moyenne)
– Le visage et la tête sont mordus dans 46% des cas. Les morsures à la tête et au visage étaient le fait de chiens qui mangeaient dans 78% des cas et de chiens qui jouaient dans 67%.
– Plus l’enfant est jeune, plus le risque d’être mordu au visage est grand !
– Dans 25% des cas, les morsures sont multiples. Les morsures multiples sont plus fréquentes à la maison que dans les lieux publics et quand l’enfant joue avec le chien.
– 84% des enfant mordus ont eu un suivi médical mais seulement 2% ont eu un suivi psychologique.
– Un vétérinaire est consulté dans… seulement 28% des cas.
– 4,9% des enfants de 8 ans sont mordus par un chien.
– Une récidive de morsure dans la même année se retrouve dans 16% des cas en moyenne, 29% des cas avec le chien de la maison.
Discussion et prévention
– Plus de 50% des enfants seront mordus par un chien entre la naissance et l’âge de 20 ans, parfois plusieurs fois, et un certain nombre sévèrement.
– La majorité des accidents se passent quand l’enfant est seul avec le chien. La prévention est simple : on ne laisse pas enfants et chiens seuls sans surveillance.
– Des situations à risque sont les mouvements de l’enfant en direction du chien, ou l’envahissement des zones de sécurité du chien au moment du sommeil et du repas. Donc apprendre dès que possible à l’enfant à appeler le chien à soi et ne pas laisser l’enfant aller vers le chien, à ne pas le déranger quand il mange ou qu’il se repose.
– De nombreux accidents arrivent pendant le jeu avec le chien et il faut envisager que le chien perd une partie de son contrôle pendant l’excitation.
– Comme 16% des enfants sont mordus une nouvelle fois durant l’année, il est urgent de mettre une prévention secondaire, de consulter un vétérinaire comportementaliste et de traiter le chien.
– Seulement 2% des enfants ont consulté un psychologue. Ce chiffre est dramatique ! De nombreux enfant souffrent de troubles psychologiques post-traumatiques et devraient obtenir un suivi psychologique.
– Toute menace doit être considérée comme une agression, jusqu’à évaluation par une personne compétente.
– Toute agression doit être évaluée pour en comprendre les dynamiques, tenants et aboutissants et permettre d’éviter des accidents.
– S’il vous semble qu’un enfant est en danger de maltraitance passive ou active à cause d’un risque de morsure ou de la dangerosité d’un chien, vous devez (et le vétérinaire avec !) faire une déclaration à la police, au juge des enfants à une association d’aide aux enfants… pour le vétérinaire qui examine le chien ou pour le médecin qui examine l’enfant, le danger rend caduque le secret médical et, dans le cas contraire, il y aurait possibilité de considérer qu’il y a « non assistance à personne en danger ».
Comment se comporter devant un chien agressif?
Il est plus important de survivre et de rester indemne que de gagner à tout prix le conflit !
– Ne pas aller vers le chien : il vaut mieux ne pas aller vers un chien ; il est toujours préférable de l’appeler à venir vers soi. On évite de cette façon toute agression défensive. Le chien a le droit de refuser.
En présence d’un chien agressif :
– Rester debout : le chien a tendance à davantage respecter l’être humain en position debout qu’en position couchée ou accroupie
– Rester immobile : le chien agresse rarement sans aucune raison. Même en état de surexcitation, il agresse peu une personne immobile. Par contre, il attaque plus aisément une personne qui bouge, surtout si les gestes sont saccadés, chaotiques
– En position debout, garder les bras le long du corps
– En position accroupie ou couchée, protéger la nuque : si l’on est tombé et que l’on est attaqué par un chien, il est préférable de pencher la tête vers la poitrine, de croiser les mains derrière la nuque et de ramener les coudes devant la face. Cette position protège contre les morsures mortelles au cou.
– Ne pas regarder le chien en face : en face d’un chien menaçant, il vaut mieux le regarder de côté, et non pas de face. Le regard de face est menaçant, le regard de côté est apaisant
– En cas d’attaque, donner des coups de pied dans le ventre. Si l’immobilité n’empêche pas l’attaque du chien, vous avez le droit de vous défendre. Dès que le chien est surpris et s’arrête, il faut trouver un endroit pour se mettre en sécurité. Si nécessaire monter à un arbre, appeler à l’aide, s’associer avec d’autres personnes, s’enfermer dans une autre pièce, etc.
Si le chien agressif doit être manipulé :
– Mieux vaut lui mettre une muselière et un collier étrangleur avec laisse. Vous pouvez alors contrôler un chien qui fait la moitié de votre poids. N’hésitez pas à étrangler le chien afin qu’il se calme par manque d’oxygène. Dès que le chien est calmé, vous devez desserrer le collier pour lui permettre de respirer. Restez vigilant et prêt à tirer sur la laisse une nouvelle fois.
– Si le chien agressif qui doit être manipulé est libre, s’il n’est pas muselé et ne porte ni collier ni laisse, mieux vaut appeler à l’aide un expert ou la police.
Réf : « Le chien agressif » (Joël Dehasse, édition Publibook)